Le procureur de la République de Bordeaux et le directeur interdépartemental adjoint de la police nationale ont annoncé ce vendredi 15 mai de nouvelles méthodes coup de poing contre les rodéos urbains. Ils espèrent ainsi dissuader les conducteurs et le public de participer à ces événements qui se multiplient dans la métropole bordelaise.
Des centaines de chevaux sous le capot, et plusieurs dizaines de milliers d'euros sur le marché. BMW, Mercedes ou Audi, ces bolides, qui sillonnaient il y a peu l'asphalte bordelais, sont désormais en vente. Et leurs propriétaires ne devraient pas les revoir de sitôt.
Sommés de frapper un grand coup contre les rodéos urbains dans une circulaire du ministère de l'Intérieur en date du 9 mai, le procureur de la République de Bordeaux et le directeur interdépartemental adjoint de la police nationale n'ont pas attendu pour mettre en place des mesures inédites.
Saisie automatique des véhicules
Parmi elles, l'arrestation du moindre participant à un rodéo urbain dans la métropole bordelaise donnera désormais lieu à la saisie automatique de son véhicule. Celui-ci sera alors mis en vente avant même que son propriétaire soit jugé.
Un grand coup au portefeuille, pleinement assumé par les autorités. "La dissuasion passe par le financier, très clairement, affirme Renaud Gaudeul, procureur de la République de Bordeaux. La prison n’est pas la réponse à tout. Parfois elle s’impose, et elle sera certainement utilisée si nous devons avoir des récidivistes.
Avant même qu'il y ait récidive, cette sanction financière de plusieurs dizaines de milliers d'euros doit être de nature à dissuader.
Renaud GaudeulProcureur de la République de Bordeaux
Défèrement et contrôle judiciaire
Autre mesure forte : les participants interpellés s'exposent maintenant à un défèrement systématique devant un juge après leur garde à vue. Ils pourront également être "placés sous contrôle judiciaire lorsque cela est justifié, indique Renaud Gaudeul, ce qui leur donnerait interdiction de conduire et de sortir le soir, en particulier le week-end."
Par cette méthode coup de poing, les autorités espèrent là encore éveiller les consciences. "C'est important pour commencer à peser sur les esprits, estime Eric Krust, directeur interdépartemental adjoint de la police nationale. Cela fait trop longtemps qu’on fait un travail de prévention mais les gens ne veulent pas entendre raison. Il s’agit désormais pour nous de passer à la strate supérieure."
Drones de surveillance
Parmi les moyens déployés figurent également des drones de surveillance, "qui avec un cadre juridique adapté, nous offrent un outil révolutionnaire depuis environ deux ans, apprécie Eric Krust. Cela permet de mieux cerner les itinéraires empruntés, les lieux de départ, de repli ou de stockage, les complicités éventuelles lorsqu'une patrouille au sol essaie de neutraliser un individu... Et ainsi de mieux asseoir les enquêtes judiciaires."
En plus des arrestations en flagrant délit, les images et la reconnaissance des plaques d'immatriculation permettent aux enquêteurs d'appréhender les participants à ces "runs" après coup. "Ce n’est pas parce qu’ils n’ont pas été interpellés immédiatement qu’ils ne risquent rien, insiste le procureur de la République de Bordeaux. Nous avons une dizaine de dossiers en cours pour lesquels les auteurs ont été identifiés et qui feront l’objet d’arrestations dans les prochaines semaines."
Protéger le public
Avide de sensations fortes, le public, souvent venu en nombre, se met tout autant en danger que les conducteurs eux-mêmes. "On travaille contre ces infractions mais aussi pour protéger le public qui prend des risques inconsidérés en se collant aux itinéraires employés par les conducteurs, rappelle Eric Krust. Cela se joue à quelques centimètres près, et ce ne sont pas des pilotes aguerris de rallye."
À travers toutes ces mesures, les autorités espèrent endiguer un phénomène qui passionne des personnes venues de tous horizons. "En général ce ne sont pas des voyous, ils veulent seulement assouvir une passion, précise le directeur interdépartemental adjoint de la police nationale.
Les organisateurs peuvent regretter qu'il n'y ait pas d'infrastructure adaptée, mais cela ne leur donne pas le droit de s'approprier la voie publique et de créer ce danger.
Eric KrustDirecteur interdépartemental adjoint de la police nationale de Bordeaux
Si des rodéos sont organisés toute l'année, ces événements reviennent en force chaque printemps, au retour des beaux jours. À Bordeaux, plusieurs runs sauvages ont lieu chaque semaine, en particulier le vendredi soir. Le dernier en date, le 9 mai, a notamment rassemblé plus de 3000 personnes autour de 500 véhicules. Au total l'an passé, 44 000 rodéos ont été recensés partout en France.