La préfète Nadège Baptista s’oppose au legs des archives de Patrick Buisson à une congrégation catholique de Mayenne. L’ancien conseiller de Nicolas Sarkozy, décédé en 2023, avait voulu confier ses enregistrements et écrits à la Fraternité Saint-Vincent-Ferrier. L’État invoque des raisons juridiques et statutaires pour justifier ce refus.
L’affaire mêle mémoire politique, religion et droit successoral. Patrick Buisson, ancien conseiller influent de Nicolas Sarkozy et figure associée à la droite radicale, avait décidé avant sa mort, en 2023, de léguer ses archives personnelles à la Fraternité Saint-Vincent-Ferrier, une congrégation religieuse traditionaliste située dans le sud de la Mayenne.
Ces archives sont considérées comme sensibles : Buisson avait enregistré l’ensemble de ses conversations et réunions durant la présidence de Nicolas Sarkozy, entre 2007 et 2012. Une pratique qui avait déjà suscité de nombreuses polémiques à l’époque.
La révélation de ce legs par Mediapart avait aussitôt provoqué un vif débat sur la nature et la légitimité de ces archives, entre documents privés et patrimoine public.
L'État s’oppose pour des raisons juridiques précises
Dans un entretien à ICI Mayenne, la préfète Nadège Baptista a expliqué les motifs de sa décision. Elle s’oppose "à l’acceptation de ce legs s’agissant des droits d’auteurs patrimoniaux et extra-patrimoniaux des œuvres de Patrick Buisson, de la gestion de la concession funéraire de l’intéressé, ainsi que de ses archives".
En revanche, la préfecture précise que "le reliquat des biens concernés par ce legs pourra être accepté par la Fraternité Saint-Vincent-Ferrier".
L’administration justifie son refus par la nature religieuse de la congrégation : "L’objet statutaire de la congrégation (...) ne concerne qu’un caractère religieux". Elle "ne peut accepter de recevoir les droits d’auteurs patrimoniaux et extra-patrimoniaux des œuvres de Patrick Buisson, puisque la gestion des droits d’exploitation de ces œuvres n’entre pas dans son objet statutaire".
De même, la concession funéraire "ne peut relever que de ses seuls héritiers physiques", conclut la tête de l’exécutif départemental.
Une vigilance accrue sur les legs à des congrégations
La préfecture rappelle que de nombreux legs sont consentis chaque année à des associations religieuses, culturelles ou humanitaires. En Mayenne, "la préfète a statué sur huit legs en faveur de congrégations religieuses en 2023, six en 2024 et six également en 2025".
Selon ses services, "la Fraternité Saint-Vincent-Ferrier est régulièrement bénéficiaire de legs", soulignant que ce type de dons reste encadré par un contrôle administratif minutieux.
Les inquiétudes de la Ligue des droits de l’Homme
Avant cette décision, la Ligue des droits de l’Homme (LDH) de Laval avait exprimé ses préoccupations. Pour son co-président Alain Voisin, "il est important que les pouvoirs publics jouent pleinement leur rôle quant au respect des droits essentiels".
L’association jugeait que "les archives de monsieur Buisson sont issues, pour l’essentiel, de ses fonctions exercées au sein des plus hautes institutions de la République, notamment à la présidence de la République. Elles ne peuvent, de ce fait, être assimilées à de simples archives privées. Elles relèvent pleinement du patrimoine archivistique public et doivent être traitées comme telles".
Cette position, désormais confortée par la décision préfectorale, met fin à la controverse autour du legs de Patrick Buisson.
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